L’APRÈS TOUR DU MONDE

LA CONTRE-AUTO-INTERVIEW AU RETOUR
(juin 2012)
(Lisez aussi mon auto-interview écrite avant le départ !)


– Olympia, la question que tout le monde se pose après ces 8 mois de voyage… quel est l’endroit que tu as préféré ?
– C’est une question logique à laquelle il est difficile de répondre. J’ai vu tellement de paysages différents, visité tellement d’environnements variés… 
Malgré tout quelques lieux m’ont profondément marquée : l’excursion sur le glacier Perito Moreno en Argentine restera inoubliable, la montée du Wayna-Picchu au Pérou et le Sud Lipez en Bolivie avec ses montagnes, volcans et le désert de sel d’Uyuni restent des moments exceptionnels qui m’ont littéralement « retourné la tête ». Pour le reste, je garde des souvenirs impérissables de chaque lieu que j’ai visité.

– Changer tout le temps de lieu, c’est fatiguant ? 
– Oui c’est fatiguant. Même si l’excitation due au voyage et à tout ce que l’on découvre vous fait lever aux aurores, on a vite fait d’avoir envie de se poser quelques jours. Une façon de s’approprier les lieux est de sortir ses affaires de son sac à dos. Au début on les sort soigneusement car on veut éviter d’avoir à tout refaire, mais au bout de quelques jours on sait exactement où placer chaque vêtement ou objet, et on a vite tendance à s’étaler dans les chambres d’hôtels sans se soucier de l’ordre…il y a mieux à faire dehors ! Du coup cela devient vite pesant de déballer-remballer tous les 2 ou 3 jours (surtout lorsqu’on a optimisé l’espace au maximum et que cela devient un jeu de briques). Le plus grand des conseils est donc de voyager LEGER (facile pour les hommes qui se contentent de 3 tee-shirts et 2 slips) mais un vrai challenge pour nous les femmes. 
J’avais de 15 à 17 kg dans mon grand sac à dos, 5-6 kg dans mon sac avant (netbook, guides, connectique…) et 3-4 kg dans mon sac annexe (appareil photo, papiers d’identité, argent…), j’avais donc au total de 22 à 25kg sur le dos lors de mes déplacements, c’était parfois dur mais je m’arrangeais pour ne jamais avoir à marcher plus de 20mn avec.
Il est vrai que l’on trouve pratiquement tout ce dont on a besoin (et on n’a rapidement besoin que du strict nécessaire) mais on n’a pas forcément envie de passer du temps à faire du shopping. Petite anecdote : A Mui Né sur la côte du Vietnam j’ai passé 4 jours à chercher un paréo pour pouvoir m’allonger sur le sable, m’étant séparée du mien à Los Angeles puisque persuadée qu’une fois arrivée à la plage j’en trouverai un sans aucun problème. Impossible, il semblait que les magasins faisaient le boycott du paréo ou drap de plage, peut-être un lobby des loueurs de transats pour russes ! J’ai fini par utiliser un drap coupé que l’on a bien voulu me donner…

– Comment as-tu fait ton itinéraire ? est-ce que tu avais réservé tes hostels, etc ?
– J’avais établi un itinéraire global en traçant les grandes lignes qui passaient par les lieux que je tenais à voir. J’ai bien travaillé la partie Amérique du Sud de voyage en amont. Beaucoup de gens disent qu’ils préfèrent partir sans rien préparer et c’est ce qui m’est arrivé en Asie où je suis arrivée « les mains dans les poche » et sans guides de voyage. Mais je préfère malgré cela « étudier le terrain » à l’avance en prenant le temps de décider de ce que j’ai envie de voir « absolument ». C’est aussi une façon d’être déjà partie et cela permet de ne pas perdre de temps ou d’éviter de rater des endroits plus difficile à trouver, sachant que c’est évidemment sur place qu’on découvre le pays. Dans tous les cas c’est une base, une fois sur place je me laisse toujours l’entière liberté de pouvoir changer de route, aller au gré du vent ou des rencontres, du coup la combinaison de ces deux modes me parait idéale !
J’ai en général réservé mon lit à l’avance la veille ou la nuit suivant mon arrivée dans les lieux pour lesquels mes vols étaient bookés, pour le reste, je réservais parfois mon lit 1 ou 2 jours à l’avance lorsque j’avais trouvé des hostels vraiment sympa (et donc susceptibles d’être complets), sinon je voyais sur place. Comme j’ai voyagé hors saison j’ai eu la chance de presque toujours trouver de la place et de bénéficier des tarifs de basse saison.

– Olympia, qu’est ce qui t’a manqué le plus durant ces 8 mois ?
– J’espère que ma famille et mes amis ne m’en voudront pas, mais rien ne m’a vraiment manqué durant ce Tour du Monde. J’ai une maman inquiète de nature et j’ai pris le soin de lui donner des nouvelles tous les 2 ou 3 jours au maximum. La magie d’internet à fait que j’ai été en contact régulier avec le reste de ma famille et mes amis, même si j’ai eu la surprise de maintenir un contact parfois plus soutenu avec des personnes qui ne faisaient pas partie de mon cercle d’amis proches.
Mon challenge n’était pas de faire un remake du film INTO THE WILD ni de faire « le tour du monde des spots de fête ». Il est évident que le partage via Facebook m’a permis de ne jamais me sentir trop seule (même si la compagnie était virtuelle !) car quelle que soit l’heure du jour ou de la nuit il y avait toujours quelqu’un sur le globe avec qui échanger quelques mots.
Gourmande comme je suis, je redoutais de manquer de nos spécialités fromagères et charcutières… mais étrangement j’y ai rarement pensé. Finalement, rien ne m’a vraiment manqué… si ce n’est ma petite baignoire de 70 cm !

– Question argent, comment as-tu fait ?
– Je suis de nature économe, j’ai l’habitude de garder mon argent pour mes voyages. Des années de pratique font que je n’ai pas vraiment besoin de tenir mes comptes au jour le jour car je sais que je suis à peu près dans les clous. J’avais prévu un budget de 1000 euros par mois qui englobaient les déplacements (hors vols), la nourriture et l’hébergement (et les massages en Asie !). Il y a eu quelques extras non prévus au programme comme la location d’un 4X4 plusieurs jours en République Dominicaine, 3 plongées en Asie… A peu de choses près j’ai réussi à respecter mon budget et ce bien que du fait que je voyage seule je ne pouvais pas réaliser d’économies d’échelle sur les chambres, etc.
J’avais emporté 2 cartes bleues (dont une carte Premier de la BNP pour les assurances qui vont avec). Leur réseau d’alliances m’a permis de retirer de l’argent sans frais aux DAB de plusieurs pays de Sud Amérique. En Argentine mon cousin m’avait désignée comme co-titulaire de son compte HSBC sur lequel j’avais versé de l’argent et qui possède un très vaste réseau mondial.
Dans certains pays les retraits sont limités à de très faibles sommes, on est donc obligé de procéder en plusieurs retraits (et donc cumuler les frais !) et dans ces cas j’allais directement faire un retrait au guichet d’une banque. Dans les pays que j’ai visités on est généralement obligé d’avoir son argent en espèces. Il ne faut vraiment pas compter sur les paiements par CB ni les travelers chèques qui sont rares.
J’avais aussi pris 300 euros en traveler cheques (dolars et euros) pour m’assurer un peu d’argent en cas de vol ou perte de mes biens. Je les ai finalement utilisés en fin de voyage pour les écouler.

– Ca fait quoi de voyager seule ?

– Dès le départ de mon voyage j’ai ressenti un bien-être immense, le fait d’être seule me permettant de ressentir pleinement toutes les émotions ; tous les sens en éveil et totalement dédiés à ce que le monde m’offrait, j’ai pu profiter à 100% de tout ce qui venait de l’extérieur mais également de l’intérieur de moi-même. J’ai bien noté la différence : à chaque fois que je me retrouvais en compagnie d’autres personnes, je ne regardais plus autant le paysage, je ne savourais plus autant ce qui m’entourais et je trouvais à chaque fois cela dommage. Bien entendu c’était au profit de rencontres « humaines » mais du coup j’ai souvent choisi de rester seule pour être le plus possible en communion avec la Nature. Contrairement à la plupart des voyageurs en solo qui disent que l’on n’est finalement jamais seul, je pense avoir passé près de 80% de ce voyage sans autre compagnie que celle de mon appareil photo… et la plupart du temps du fait de ma propre volonté. J’ai ainsi rapidement évité les hostels de backpackers car je me sentais décalée par rapport à cette ambiance souvent festive et en tous cas toujours « trop western » à mon goût (« western » est le terme généralement employé pour désigner les touristes venant de l’Ouest), de plus j’ai voyagé partout hors saison et « à contre-courant » des circuits habituels, du coup c’était difficile de trouver des compagnons de route puisque nos itinéraires ne correspondaient pas. De plus, j’avais envie de m’intégrer, de tenter de fusionner au maximum avec mon environnement plutôt que de faire les activités en groupe et entre touristes alors que cela revenait généralement moins cher, qu’on n’avait pas à se soucier de l’organisation et que c’était l’occasion de rencontrer d’autres personnes.


– Et les rencontres, justement… ?
– Les rencontres que j’ai faites tout au long de mon voyage ont pour le coup été vraiment très fortes et marquantes, qu’elles aient duré quelques heures ou plusieurs jours. J’ai fait la connaissance de gens extraordinaires, de voyageurs incroyables comme ce vieil écossais qui effectuait pour la 3ème fois le trajet Ecosse-Patagonie… en moto…! ou cette jeune chinoise de 20 ans qui avait traversé tout le Moyen-Orient seule jusqu’en Argentine… ou encore cet infirmier chilien qui vivait sur une île isolé de tout mais avec internet, la télé par satellite et tout le confort alors que le village d’en face pour lequel il fait office de médecin vit encore au rythme de la pêche et sans électricité…
Je sais que je reverrais ces personnes un jour ou l’autre, et grâce à Facebook nous sommes aujourd’hui en contact très régulier, c’est fantastique !

– Est-ce que tu as eu des galères ? Est-ce que tu t’es sentie en danger ?
– A part mon séjour de 2 mois à « Las Galeras » qui n’en a eu que le nom… je n’ai jamais eu de grosse galère ! Je m’en étonnais moi-même et je dois même avouer que j’ai eu l’impression d’avoir une protection « divine » durant tout mon voyage… tout se goupillait toujours parfaitement, et je n’ai jamais vraiment eu de coup dur.
Je ne me suis jamais retrouvée dans une situation qui eût pu mettre ma sécurité en danger (ou du moins je ne l’ai pas su !). Dès mon arrivée à Buenos-Aires tous les gens que je rencontrais me mettaient systématiquement en garde contre les vols à l’arrachée, les pickpockets, les vols par ruse et cette ambiance de paranoïa m’a tellement dérangée que j’ai fini par décider d’éviter au maximum les grandes villes, préférant profiter de la Nature. Pour le reste il suffit de ne pas tenter en prenant les précautions de base. Hors des villes je n’ai jamais ressenti le moindre danger même si je restais toujours vigilante.
D’ailleurs l’on prend vite l’habitude de ne jamais lâcher son sac le plus important des mains ou des yeux, de regarder systématiquement derrière soi lorsque l’on quitte un lieu pour voir si on n’a rien oublié, de recompter ses sacs, son argent, prendre le temps de s’assurer en général. C’est pas si compliqué… !

– Est-ce que tu rentres changée ?
– J’ai souvent réfléchi à cette question, car c’est ce que l’on me disait avant de partir. Je n’ai pas l’impression d’avoir changé, mon caractère reste le même, bien entendu je suis chargée de toutes ces émotions et rencontres. Je me sens plus forte et plus sûre de moi dans certains domaines, je sais maintenant que je suis capable de voyager seule, ce que je redoutais le plus. Je rêvais de partager ce voyage avec quelqu’un et cela m’a forcément manqué, mais ce sentiment était rapidement compensé par l’extrême liberté que je pouvais m’offrir. Je crois aussi être encore plus tolérante envers les autres et éviter certains préjugés ; ne pas juger les gens sur un acte sans en avoir tout le contexte et respecter les choix de chacun. Même si je me forçais déjà à le faire dans le passé, je crois qu’aujourd’hui je me le répète systématiquement avant de prendre position ou de me faire une idée sur une personne ou sur son comportement à un moment donné.
 
– Est-ce que ce voyage à répondu à tes attentes ?
– Ce tour du monde a été tellement au-delà de toutes mes attentes…
J’ai passé huit mois d’euphorie ; avant de partir je me disais que ça allait être fantastique, mais ce que je vivais au jour le jour était encore tellement plus fort que j’avais l’impression d’être dans un état second ! Je vivais tout à fond, je ressentais toutes les émotions pleinement, j’étais gorgée de bonheur et parfois j’avais du mal à y croire moi-même, j’ai eu l’impression d’avoir un ange-gardien au-dessus de moi durant tout le voyage tellement les choses se goupillaient bien, tellement tout ce qui m’arrivait était positif.
Au final j’ai profité de chaque seconde, j’ai vécu ces 8 mois avec tous mes sens, les écoutilles grandes ouvertes, j’ai eu l’impression de tout vivre à fond, complètement. Je n’ai aucun regret, ni sur les destinations, ni sur mon itinéraire, si c’était à refaire, je le referais de la même façon mais avec encore plus de temps…

– Et la télé dans tout ça ?!
– Je crois que je n’ai pas vu un écran de télé avant mon arrivée en Thaïlande au mois de mars. Il y avait un poste dans le salon-jardin de ma guest house à Chiang Maï, et un matin je me suis retrouvée à manger mes nouilles café-au lait devant Nicolas Sarkhozy qui faisait un discours pour faire suite à la tuerie de Toulouse. J’ai failli recracher mon café de surprise… A Hoi An au Vietnam j’avais aussi un poste dans ma superbe chambre de l’hôtel Jade et j’avoue l’avoir allumée les 2 soirs, pour écouter les programmes en Vietnamien car la langue me fascinait… !
Enfin, la dernière fois que j’ai allumé TV5 Monde c’était le soir du 2ème tour des élections présidentielles, mais les résultats ont été divulgués avec une heure de retard par rapport à la France, autant dire que je connaissais le nom de notre nouveau président bien avant, au vu des statuts de Facebook.
Les émissions qui m’ont manqué… vous allez rire mais j’aurais bien regardé un petit S.A.V de temps en temps, j’étais désespérée de ne pas pouvoir accéder aux catch up des Nouveaux Explorateurs car il n’y a pas de droits internet dans les pays que j’ai visités, et de toute façon les débits que j’avais généralement étaient trop bas pour rester calme devant mon ordinateur.
J’avais emporté quelques films « au cas où », je n’en ai finalement vraiment regardé aucun, à part quelques épisodes de H durant ma première semaine en République Dominicaine pendant laquelle il a fait un temps à rester dans mon lit Queen-Size en bambou avec vue sur… la mer… et j’ai bien ri !

– Olympia, une dernière question…. ET MAINTENANT ?
– Et maintenant… il faut accepter que ce projet de 8 ans est derrière moi, que bien sûr il reste la plus grande et merveilleuse expérience de ma vie, mais je ne peux m’empêcher de penser à ma prochaine destination, maintenant que j’ai ouvert tant de portes j’en vois d’autant plus à la portée de mes mains, mes yeux et mes pieds !
En attendant je suis en train de préparer une expo photo tant que c’est « chaud », j’ai hâte de revoir ces paysages en grand format et d’en faire profiter d’autres en attendant mes prochains voyages.